Le contexte
Après sa défaite militaire, les maréchaux forcent Napoléon 1er à abdiquer le 6 avril 1814. Les pays coalisés le condamnent à l’exil sur l’île d’Elbe.
Le 20 avril ont lieu les « Adieux de Fontainebleau ». Le 4 mai, Louis XVIII fait son entrée à Paris. C’est le début de La Restauration et un retour à la souveraineté monarchique de la Maison de Bourbon.
Cette période est entrecoupée par les Cent-Jours du 20 mars au 8 juillet 1815 pendant lesquels l’empereur déchu Napoléon Ier reprend le pouvoir. Cet intermède permet de distinguer la Première Restauration de la Seconde Restauration.
Après la première abdication de l’Empereur, il est décidé la suppression de cent régiments d’infanterie (sur plus de deux cents) et de trente-huit de cavalerie (sur cent deux).
Douze mille officiers sont mis à la retraite ou en position de demi-solde et trois cent mille soldats sont licenciés. Ces officiers déclassés, privés de commandement et d’affectation, retournent à la vie civile. Chaque mois, ils ne touchent qu’une solde réduite au chef-lieu d’arrondissement, leur permettant tout juste de vivre décemment. Ces « demi-solde » sont tenus de s’installer dans le département de leur lieu de naissance.
La situation des « demi-solde » n’est pas définitive aux yeux de l’administration militaire qui les a toujours sous sa dépendance et un certain nombre de ces officiers est rappelé à l’activité. A contre courant des idées reçues, nombre d’individus de la Grande Armée acceptent aisément le retour à la vie civile et beaucoup, par exemple, une fois mis à la retraite définitive, en profitent pour se marier.
On constate que les demi-solde se diluent aisément pour la plupart dans un retour à la terre, dans l’industrie et l’artisanat ou encore dans les emplois administratifs. Sachant pour une majorité lire et écrire, dans une société où le nombre des illettrés est supérieur à la moitié de la population, des postes dans l’administration leur sont attribués.
La majorité des officiers de l’armée impériale a témoigné d’un loyalisme réel au retour de la vieille monarchie et seulement quelques centaines d’entre eux ont été en réalité, victimes d’une épuration politique.
Après Waterloo, une commission chargée « d’examiner la conduite des officiers de tout grade ayant servi l’usurpateur » siège jusqu’en 1817 et classe les officiers dans 14 catégories qui déterminent leur sort (demi-solde, mise à la retraite, démission plus ou moins spontanée, surveillance à domicile, exil).
L’armée en 1816 est composée de 75 000 hommes, et n’a besoin pour les encadrer que d’un effectif de 5 000 officiers. 20 000 gradés, qui restent sur le bas-côté des postes à pourvoir, ne peuvent dès lors qu’espérer un statut de retraité ou de réformé, ou bien une situation d’officier en non-activité ou à la demi-solde.
En mars 1818, l’armée compte environ 240 000 hommes. Nombre de demi-solde sont alors réincorporés dans l’armée. Les officiers à la demi-solde estimés en 1816 à 20 000 individus, ne sont plus que 5 000 environ, en 1823.
Pierre Mathieu, Un Hilairois, ancien lieutenant au 102ème régiment de ligne
Un Hilairois, ancien lieutenant au 102ème régiment de ligne, faisait partie de ces « demi-solde ».
Il s’agit de Pierre Mathieu.
Nous avons retrouvé sa fiche d’incorporation dans les registres matricules. Fils de Pierre Mathieu et de Marguerite Fromentin, il est noté la date de naissance du 30 octobre 1773 à St Hilaire.

Après des recherches infructueuses dans les registres de St Hilaire, nous avons finalement trouvé l’acte de baptême de Pierre Mathieu le 2 novembre 1772 à Mareau aux Prés pour une naissance la veille.

Le vigneron devient caporal
Comme la plupart des habitants de la région, Pierre Mathieu devient vigneron.
Il est volontaire, tiré au sort ou désigné lors de la levée en masse de trois cent mille hommes, pris parmi les célibataires ou veufs de 18 à 25 ans. Il rejoint l’armée le 30 avril 1793.
Il est ensuite incorporé comme fusilier à la 3ème compagnie du 1er bataillon du régiment Royal deux ponts.
Il effectue les campagnes militaires de 1793 à 1801 au sein de la même unité devenue le 99ème de ligne puis le 102ème. Le 17 septembre 1800, Pierre Mathieu est promu au grade de caporal.

Le caporal devient sergent
En 1805, il rejoint à Gênes le navire « La Pomone » commandé par Jérôme Bonaparte, le plus jeune frère de l’empereur. A bord de chaque navire de guerre se trouvait alors une troupe d’infanterie de ligne pour les combats tant sur mer que sur terre.
Simple lieutenant de vaisseau, Jérôme, reçoit le commandement d’une escadre composée de la Pomone, des bricks le Cyclope et l’Endymion, et de deux frégates de quarante-quatre canons, l’Uranie et l’Incorruptible.

Après avoir croisé quelques jours devant Gênes, Jérôme, par sa fermeté et ses menaces, force le dey d’Alger à rendre à la liberté plus de deux cents prisonniers français et génois, qu’il ramène à Gênes en passant habilement au milieu des croisières anglaises. La récompense de cet exploit sera le grade de capitaine de vaisseau et le commandement en second de huit vaisseaux de ligne sous les ordres de l’amiral Willaumez, chargé de ravitailler les ports des Antilles.
De retour sur terre, Pierre Mathieu réintègre le 102ème régiment de ligne. Il devient sergent le 16 septembre 1807.
Le sergent devient sous-lieutenant
Ses états de service indiquent qu’il participe aux campagnes napoléoniennes de 1806 à 1813. Le 24 décembre 1813, il devient officier en étant nommé au grade de sous-lieutenant.

Inactivité et demi solde
Après la campagne de France de 1814, il est placé en inactivité et renvoyé dans ses foyers. Il s’installe alors au hameau de Fleury chez son père. Il perçoit alors une demi solde.

Rappelé lors des 100 jours, il est de nouveau placé en inactivité lors de la seconde Restauration.

L’heure de la retraite et le retour à la vigne
Il est définitivement mis en retraite le 1er septembre 1816.


De retour à la vie civile, il redevient vigneron.
Agé de 45 ans, il épouse le 24 juin 1817, Madeleine Séjourné, 45 ans également, qui est présentée comme domestique chez M. Clerjault de l’autre côté de la rue.
C’est le même sieur Clerjault, adjoint au maire, qui procède à cette union, à 8h du matin. Cette heure matinale est peut-être due à un besoin de discrétion, suite au décès de Pierre Mathieu Père, deux jours auparavant.

Décès
Le 11 novembre 1826, Pierre Mathieu, propriétaire-cultivateur-vigneron, décède à l’âge de 54 ans, sans postérité.
